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Motivation formelle : quelle lacune littéraire ?

L’adjudicateur, après avoir comparé les offres, doit formaliser la décision qu’il prend, et ce sur base d’une motivation en fait et en droit. Cette motivation formelle doit permettre au lecteur, qu’il s’agisse des soumissionnaires ou du Conseil d’État, de comprendre les tenants et aboutissants de la décision prise. À défaut de respecter avec minutie cette obligation, l’adjudicateur s’expose à un recours des soumissionnaires évincés. 

La motivation formelle doit donc être établie avec suffisamment de précision et de complétude. Elle peut être intégrée directement dans la décision de l’organe décisionnel, laquelle peut également renvoyer à un second document, tel un rapport administratif, pour autant que ce dernier réponde aux mêmes conditions qualitatives. Si la motivation par référence est admise et couramment appliquée, encore faut-il en maîtriser la technique. 

Dans le cadre d’un marché public de travaux portant sur l’enlèvement et l’évacuation de déchets et de matériaux contenant de l’amiante, un adjudicateur érige la méthodologie de travail en critère d’attribution. Après l’attribution, un soumissionnaire évincé conteste la décision prise au motif que la motivation formelle ne lui permet pas de saisir la cotation que son offre s’est vu attribuer pour le critère d’attribution relatif à la méthodologie, et surtout, le motif pour lequel l’attributaire a recueilli davantage de points.  

Le Conseil d’État, dans son arrêt n°259.262 du 26 mars 2024, analyse la motivation formelle, qui réside, par renvoi, dans un tableau annexe, et y décèle une faille importante. Si la décision est explicite et détaillée quant au rappel du prescrit du cahier spécial des charges, à la méthode d’évaluation utilisée et aux points attribués pour chacun des critères et sous-critères, il manque un élément essentiel, à savoir l’explication des cotations attribuées. 

Le juge administratif rappelle d’emblée le principe lié à l’utilisation des cotations eu égard à l’appréciation d’un critère qualitatif ne permettant pas la simple utilisation d’une formule mathématique :

À l’égard d’un critère d’appréciation qualitative des offres, la simple attribution de cotes ne constitue pas une motivation suffisante. Des motifs doivent fonder l'attribution de points et être exprimés sous la forme d'une évaluation descriptive s'appuyant sur des références concrètes au contenu de l'offre

Il analyse ensuite la décision prise, et principalement le tableau joint, aboutissant au constat suivant : 

(...) la décision attaquée mentionne les notes globales attribuées aux soumissionnaires pour chacun des deux critères d’attribution et décrit les méthodes d’évaluation mises en œuvre. Pour le surplus, elle invite à « voir le tableau en annexe pour plus de détail ». Ce tableau présente la ventilation détaillée des cotes globales, sans autre précision.  

Au terme de la lecture de l’arrêt, l’on n’est pas surpris par la sentence :

Pareille indigence de la motivation doit être appréciée en considération du fait que cette différence de points a un impact essentiel sur le classement final des offres et permet au soumissionnaire (...) d’être classé premier. Dans ces circonstances, il est impossible tant à la requérante de comprendre la décision d’attribution (...). 

 

En conclusion, on retiendra qu’une cotation, sans explication concrète, sans littérature, n'est pas suffisante en termes de motivation formelle. 

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